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Des postures professionnelles à la professionnalité: de l’opportunité de l’inclusion comme levier d’évolution des pratiques – Gilles Brandibas – Formateur ACTIF

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IV. L'incidence de l'inclusion sur nos professionnalités

L’enjeu de l’exercice de la professionnalité nous invite à modifier notre posture d’autorité quant à décider comme à savoir dans le processus d’inclusion.

En effet, notre prise de décision est plus limitée dans l’accompagnement. Non que nous soyons devenus des prestataires de service dans une relation commerciale, ce qui tendrait à dénaturer notre mission et nos finalités, mais l’inclusion nécessite encore plus une autorité répartie et partagée. Répartie entre les accompagnants, tenants de leur propre posture et de la responsabilité des besoins des personnes : si nous devons par exemple associer des soignants de plusieurs institutions, ils ont à s’accorder sur la définition de ces besoins et sur la limite au-delà de laquelle ces besoins supplantent le seul désir de la personne.

Une dame veut rester au lit. Elle est accueillie dans un Foyer de Vie pour adultes en situation de handicap. En institution depuis sa plus tendre enfance, elle a suivi le cursus qu’ont connu bien d’autres adultes présentant une déficience intellectuelle importante. La communication est assez réduite dans la mesure où elle n’a jamais acquis le langage verbal. Les professionnels ont pu, à force d’observations et de liens de cause à effet, déduire ses oppositions et acceptations, d’une communication non verbale associée à des attitudes franchement exprimées dans une compréhension la plus proche possible de ses désirs ou refus. Leur difficulté est de savoir s’il faut insister pour qu’elle puisse se lever et vivre dans le quotidien partagé avec les autres, participer aux activités, ou s’il est plus important de lui accorder cette liberté de faire ce qu’elle veut, manifestement de rester au lit. Or, ce qui pose une première difficulté, c’est l’habitude qu’ont prise les accompagnants d’être si prévenant avec les personnes qu’ils anticipent le plus possible leurs besoins, au risque même de s’en plus préoccuper que de leurs désirs. En second lieu, à partir de quelle limite s’agit-il de respecter le droit de la personne ou d’assumer le devoir de préserver son existence ?

Dans cet exemple, s’agissant d’une personne présentant une déficience intellectuelle, le handicap en question est réputé entraver la capacité de la personne à percevoir adéquatement ses propres besoins.

Il existe des difficultés qui légitiment le pouvoir, dans certains cas, de convaincre la personne du bien-fondé de ce que nous lui proposons et, dans des cas plus rares, de le lui imposer.

Dans le processus d’inclusion, il est plus difficile de composer les accords et désaccords entre professionnels d’institutions, d’horizons et de cultures professionnels différents. Or, la posture professionnelle d’autorité nous demande de mettre de côté notre savoir et nos convictions pour construire une décision commune, un savoir commun, en s’appuyant le plus possible sur ce qui nous semble être au plus proche du désir de la personne.

Dans le cas présenté en illustration, l’inclusion est-elle possible ? Cette personne présentant une déficience intellectuelle moyenne et souffrant peut-être de dépression est-elle à même de pouvoir vivre dans un logement autonome, voire dans un des dispositifs innovants intermédiaires expérimentés depuis plusieurs années ici et là ? Tout dépend d’un certain nombre de paramètres. Il faudrait au préalable recueillir son avis sans l’influencer, ensuite évaluer de quelle manière, si elle est dans ce projet d’un autre type d’hébergement, cela peut se faire en réduisant au maximum les risques.

Profitons de cet exemple et de cette partie de nos arguments pour revenir (Meli & Brandibas, 2020) sur le statut de l’inclusion.

Si l'inclusion est une finalité, elle biaisera d'entrée notre posture et induira même une autorité indue au détriment de la personne et de son autodétermination. Vouloir à l'avance inclure la personne sans savoir si cela correspond à ses besoins et à ses aspirations, c'est l'assigner à une place sans autre forme de procès. 

Si, au contraire, l'inclusion est un moyen, cela signifie qu'elle n'est pas systématique et qu'elle peut constituer un levier pour l'autodétermination de la personne, pour l'accomplissement de ses projets personnels.

Par ailleurs, du côté de la pratique de la professionnalité, repenser sa posture au regard de la double autorité savoir/décision, c’est en déduire une modification concrète de sa posture dans la pratique. Par exemple, une pratique professionnelle qui reposait beaucoup sur le faire évolue vers le regarder faire, ou rester à côté. Certes, les accompagnements en institution n’ont pas attendu l’inclusion pour se questionner sur la posture, entre faire pour l’autre ou à sa place, avec, jusqu’au maintien en retrait. L’idée est ancienne et pourrait paraître même éculée. Toutefois, l’inclusion est sans doute l’occasion de réinterroger plus régulièrement notre posture au regard du continuum suivant.

 

 

Toujours au niveau de la pratique, les pratiques entre intervenants devenus partenaires et non plus collègues doivent être convergentes au risque, sinon de devenir concurrentielles. La concurrence qui ne serait que jeu d'ego est à bannir au profit d'une volonté d'articulations. Ce n'est pas gagné à l'heure de la performance à tout crin et dont les effets destructeurs sont notables (Gilbert et al.,2009).

Enfin, l'expérience de la professionnalité rencontre dans l'inclusion une opportunité, et d'abord celle de mettre au travail nos ego, c'est-à-dire les mettre de côté. les enjeux narcissiques sont légion dans les échanges et postures, ils impliquent les déports de culpabilité et les projections. Enjeux inconscients, cela va sans dire, nous ne ferons le procès de personne. Mais nous avons tous la responsabilité de ne pas nous rendre dupes.

Une société centrée sur l'image et l'ego, comme la nôtre (Schmitt, 2014) nous entraîne bien malgré nous dans ces enjeux, au risque d'en oublier le pourquoi de nos missions et l'intérêt de la personne accompagnée. Ledit intérêt ne devient dans ces enjeux que le prétexte d'une bonne confiance/conscience affichée. 

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