À quoi faisons-nous référence lorsque nous parlons de « comportements problèmes » et plus globalement de « handicap », de « déficients intellectuels », parfois encore de « troubles du comportement » ? Il est rare que ces façons de nommer les personnes accompagnées dans les ESMS soient remises en question ou fassent l’objet d’une réflexion in situ. Seules les personnes concernées manifestent de fortes réticences à être nommées en lien avec un aspect, une particularité de naissance.
Un certain nombre de clichés que nous véhiculons au travers des mots que nous employons procèdent encore fréquemment de réductions identitaires des personnes et peuvent favoriser des pratiques d’accompagnement stéréotypées. Ces stigmates peuvent révéler des pratiques qui font référence à des pédagogies orthodisciplinaires, centrées sur l’aspect lésionnel du handicap et font peu de place à l’intelligence des sujets concernés et à leur pouvoir d’agir.
Formateur dans différentes écoles pour travailleurs sociaux et chef de service éducatif en foyer de vie auprès d’adultes, j’observe quotidiennement que les termes stigmatisants de handicap, de déficience véhiculent un regard réducteur sur la personne, atteignent son développement identitaire et agissent plus globalement sur l’accompagnement dont elle est l’objet.
Au sein de notre établissement, l’équipe du service d’accueil de jour a vu le renouvellement d’environ 30 % de son public accueilli. Face aux nouvelles attentes de ce « nouveau public » une réflexion autocritique de fond s’est engagée portant sur les risques de réification que pouvaient générer certains fonctionnements institutionnels.
Au carrefour de ces parcours de vie, l’équipe de l’accueil de jour a souhaité réorienter son travail vers un cadre différent, évitant la corrélation systématique des troubles neurodéveloppementaux à celles de troubles du comportement.
Il s’agissait d’offrir une place plus centrale aux attentes des personnes en renforçant leur autodétermination, leur pouvoir d’agir en groupe et leur association à des solutions décentrées de l’aspect réducteur de leur déficience.
Ce travail a nécessité de redéfinir le cadre et la contenance, non pas dans leur acception disciplinaire, mais dans de possibles adaptations, en écho avec la créativité des personnes concernées.
Même si plusieurs évolutions sociétales ont contribué au projet d'une "égalité des chances", l'étiquette du "handicapé" génère encore le spectre de "l'incapacité globale" de la personne.
Cette réflexion d’équipe nous a amenés à redéfinir l’éducateur, l’équipe et les accompagnants dans leur capacité de pédagogue à provoquer un décalage dynamique pour repenser l’accompagnement des personnes en les concernant ou en les mobilisant. Cette démarche pose comme hypothèse que les « conteneurs culturels ou pédagogiques » sont souvent négligés au profit d’approches institutionnelles stéréotypées.
Ce témoignage vise à revenir sur la place faite aux personnes en situation de handicap et à leur capacité d’autorégulation dans un contexte d’interactions sociales et citoyennes encore relativement faibles. Nous n’aborderons pas les problématiques médicales ni les comportements problèmes dans leur lien avec des difficultés de communication ou de santé globale.
Ce travail rejoint la question de la participation des personnes concernées, de leur autodétermination et de leur contribution à l’ensemble des problématiques qui les concernent.
Nous voulons que les usagers participent, prennent des initiatives et agissent, mais les gouvernances et formes d’organisation pour les accompagner produisent parfois de l’inertie, de la placidité et une faiblesse en termes d’expérimentation.
L’écrasante notion de troubles du comportement, corrélée à la situation de handicap, relève d’une généralisation souvent excessive et d’une approche très centrée sur la notion de pathologie.
Dans une première partie, nous aborderons le résumé des éléments d’analyse et de freins à l’émancipation des personnes concernées. Nous verrons ensuite comment la notion de comportements problèmes a favorisé un décentrage des représentations pour générer une dynamique favorable à la créativité pédagogique basée sur une approche capacitaire.
Certaines vignettes pédagogiques illustreront les créations et innovations qui sont nées de cette évolution avec les personnes accompagnées et leurs accompagnants.
Cette première partie de notre réflexion a été organisée sous forme de séminaire animé par les différents membres de l’équipe. Chacun était appelé à présenter des situations rencontrées dans l’accompagnement des personnes et des approches théoriques pouvant nous aider à favoriser :
- un diagnostic partagé autour de références pratiques et théoriques ;
- un repérage des obstacles internes et externes à l’expérimentation et au pouvoir d’agir des personnes accueillies ;
- un recueil des situations pour lesquelles une créativité pourrait entraîner d’autres réponses et d’autres stratégies d’accompagnement.
Plusieurs de ces travaux sont résumés et ont été menés en intervision avec des partenaires et chercheurs multiples.
Identité en négation
« J’ai suggéré […] qu’il peut exister un écart entre les identités virtuelles et réelles d’un individu. Cet écart, s’il est connu ou visible, compromet l’identité sociale : il a pour effet de couper l’individu de la société et de lui-même, en sorte qu’il reste là, personne discréditée face à un monde qui la rejette. »
Dans un premier temps, notre travail a consisté à relever un certain nombre de paradoxes entre le concept d’inclusion, son cortège de formulations incantatoires (« égalité des chances », « même citoyenneté ») et la réalité des personnes concernées. La plupart ont été mis à part dans des lieux dédiés sous la référence de spécialistes. Cette mise à l’écart a été accompagnée d’une sémantique bienveillante mettant en avant les bienfaits de la diversité et la richesse des différences.
L’adulte accueilli en foyer de vie partage bien souvent son sentiment d’être dans un « statut en creux ». À l’arrivée de l’IME, il est suspendu à un passage qui s’apparente à un changement administratif très centré sur une moyenne de deux ou trois stages dans le secteur adulte et une orientation. Son statut est lui aussi défini par défaut dans la loi 2002-2 : « [l]es foyers occupationnels ou foyers de vie désignent les établissements médico-sociaux qui sont destinés à l’accueil et l’hébergement de personnes handicapées dans l’incapacité d’exercer une activité à caractère professionnel, mais qui ont conservé une autonomie physique ou intellectuelle suffisante pour réaliser les actes de la vie courante ».
Pourtant chaque adulte arrivant à l’accueil de jour se dit « embauché » et montre une aspiration à œuvrer et à contribuer à un monde commun. L’utilisation du terme « occupationnel » pour qualifier l’activité est quasiment absente du champ lexical des adultes concernés qui n’ont de cesse que de fabriquer et d’orienter les ateliers vers des finalités et des passerelles avec l’environnement. Ces personnes qui, dès leur plus jeune âge, ont été identifiées, classées et catégorisées par des médecins, ont été essentiellement suspendues à un traitement médical relevant de spécialistes. Ce modèle centré sur le médical a généré bien souvent une identité de malade, une identité de « handicapé » n’ayant pour place que celle qu’on veut bien leur donner comme objet d’accompagnement, de soin et de prise en charge.
D’un côté, les politiques publiques présentent un champ lexical marqué par les concepts d’autonomie, autodétermination et pouvoir d’agir, de l’autre, les personnes n’ont encore quasiment pas le choix de leur affectation. Les observations des professionnels sont très centrées, dans leurs bilans, sur la mise en évidence des bizarreries, difficultés, incapacités et écarts à la norme.
L’aspect d’eux-mêmes qui est véhiculé génère des « comportements problèmes » peu identifiés. Certains sont en difficulté pour prendre la parole ; la réflexion s’oriente vite sur un « trouble » du langage sans prendre en compte l’inhibition. D’autres se comportent de façon soumise.
Lola change de foyer et accepte sans réticence d’être séparée de son compagnon.
Dans le sillage d’une réorientation, le bilan de Cynthia par l’ESAT présente des problèmes de fatigabilité ou de troubles de l’opposition sans traduire le sentiment de désœuvrement qu’elle ressent ou la difficulté à se sentir à la hauteur de l’enjeu véhiculé par le travail. La notion de « burnout », très contemporaine chez les salariés classiques, est encore peu usitée chez les adultes en situation de handicap qui sont souvent renvoyés à des problèmes de comportement.
Globalement, rares sont les adultes accompagnés qui se considèrent comme décisionnaires de leur projet ou de leurs attentes.
Le phénomène autocentré des fonctionnements institutionnels ne facilite pas la création de communautés de personnes concernées, ce qui rend difficile la reconnaissance de formes méconnues de stigmatisation.
Appartenant à un groupe social cumulant les identités réductrices ou ce que Erving Goffman nomme « les attributs qui le disqualifient » (inactifs, inutiles, malades, déficients, autistes, etc.), les personnes en situation de handicap peuvent être touchées dans leur développement identitaire par un regard en négation.
Le modèle médical a la vie dure
Il ne s’agit pas de nier l’intérêt d’une approche médicale ou d’une prise en compte de la santé globale. La notion de « comportements problèmes » a largement contribué à l’accès au soin et à la prise en compte de nombreux aspects de la santé et de la prévention (sommeil, douleur, etc.) qui étaient souvent dissimulés derrière le vocable du « trouble du comportement ». Nous avons cherché dans ce travail à mettre en évidence le risque d’approches standardisées favorisant un regard homogène et péjoratif sur des personnes, au nom d’une médecine qui les a souvent regardées comme des anormaux en attente de traitement et de rééducation.
Tout se passe comme si, derrière les termes de « comportement » ou de « handicap », on identifiait la personne globalement à l’ensemble des traits assimilés à ces notions. Le discours biomédical met encore bien souvent en évidence un « paradigme incapacitaire », un comportement attendu du porteur de TND, TDI, TSA, TDAH. Au-delà de l’intérêt de reconnaître les spécificités de certains troubles, la systématisation des catégories provoque des généralisations, des raccourcis et des « fausses routes théoriques et pratiques ».
Il n’est pas rare que les travailleurs sociaux en formation ou en stage se posent la question d’accompagner la sexualité de la personne porteuse de trouble du développement intellectuel, la citoyenneté des autistes.
Les débats essentialisent les personnes en situation de handicap, comme si les concernés devaient être exclus des débats, des colloques et des pratiques.
Comme l’a montré Michel Foucault, le discours médical et le biopouvoir peuvent favoriser un contrôle social au nom de la protection. La généralisation actuelle du terme de vulnérabilité entraîne parfois une surprotection. L’actualité de ces travaux peut se traduire par une tentative de maîtrise du comportement et des personnes au travers d’une emprise organisationnelle des établissements. Cette emprise peut prendre des formes diverses qui confrontent les concernés à des délais excessifs et des approches souvent interprétatives et globalisantes au nom de la vulnérabilité et de la protection.
Michèle souhaite revoir son ancien compagnon (accueilli dans un autre établissement). Elle pourra rencontrer des délais qui se comptent en mois.
Lola voudrait avoir un petit réfrigérateur dans son espace personnel et la réponse s’oriente sur une généralisation des risques de mauvaise alimentation.
Emma voudrait avoir du temps hors regard des éducateurs. Un temps pour elle, un temps hors du regard des « encadrants ». Le fait qu’elle use de son temps à sa guise est sujet à beaucoup de contrôle et de jugements péjoratifs de la part de certains professionnels.
Au modèle lésionnel du handicap s’adjoint la « rhétorique des besoins » diagnostiqués par les « spécialistes » sans prise en compte des attentes de la personne.
Pour conclure cette première partie, il nous est apparu important de nous décaler de pratiques professionnelles excessivement régies par des normes qui consistent fréquemment à produire un ordre qui essentialise les personnes dites handicapées. L’enjeu était de regarder autrement les comportements et les styles comme procédant de la diversité des personnes accueillies et d’une même humanité. Ce mouvement a été amplifié par l’arrivée d’un tiers de nouvelles personnes qui cherchaient d’autres formes d’accueil, d’action de participation et de bien-être.
Tom veut faire une carrière de journaliste.
Tina souhaite bénéficier de temps personnel au moins deux demi-journées par semaine.
Aurélie veut expérimenter la vie à deux.
Christelle et Karim veulent se marier et vivre ensemble.
Jimmy veut faire une expérience comme Koh Lanta.
Martine souhaite rencontrer un copain sur un site de rencontres.
Mohamed aimerait vivre seul.
Emma veut circuler librement et aller en discothèque.
Chloé souhaite être mieux informée sur la sexualité.
Kevin voudrait s’impliquer dans une action humanitaire.
Ces demandes coïncidaient avec les questions existentielles des usagers, qui souhaitent multiplier les rencontres et actions hors du service. Nous avions besoin de repenser les fils conducteurs de notre projet de service d’accompagnement afin de créer un élan de motivation et de mobilisation et faire face à l’étendue de leurs demandes qui exigeaient un changement de modèle d’accompagnement.
« T’interdire de punir t’obligera à les occuper. Dis-toi bien que l’éducation commencera le jour où l’atmosphère sera complètement débarrassée du moindre miasme de “sanction”. Et les plus difficiles à désinfecter seront peut-être les enfants. »
Explorer de nouvelles approches
Cette modification sensible de notre projet d’accompagnement s’est fondée sur des approches issues de la désaliénation et des pratiques de pédagogie active favorisant les paramètres suivants.
§ Une implication des personnes accueillies et des professionnels pour que leur créativité, leurs idées s’inscrivent dans des contributions régulières.
§ La possibilité de créer des situations, et instances d’apprentissages et de développement des compétences.
§ Le développement d’ateliers passerelles avec différents milieux de la cité pour favoriser des interactions régulières et diversifiées.
§ La création d’instances d’accompagnement individuel et la supervision de dynamiques collectives en ateliers dédiés.
§ La conduite de projet d’influence socioconstructiviste avec des groupes ressources à la mise en œuvre de nouvelles actions.
§ L’allègement des contraintes fonctionnelles et administratives lorsqu’une initiative voit le jour.
Notre service étant constitué d’ateliers, c’est dans leur cadre que professionnels et usagers pouvaient modifier le fonctionnement et trouver les leviers d’actions nouvelles autour de leurs attentes.
Plusieurs options pédagogiques devenaient prioritaires pour renforcer le pouvoir d’agir et l’implication : l’expérimentation, la conduite de projet, la multiplication des rencontres (fréquentes et diversifiées), des supports de mémoire (journal, récit vidéo), l’apprentissage ludique et un lien marqué avec l’environnement.
Voici quelques vignettes pédagogiques présentant succinctement des projets qui se sont progressivement institués à partir de ce travail de fond.
1) Opération mes droits et devoirs : consolider la citoyenneté
Ce projet consiste à favoriser l’implication citoyenne des usagers en favorisant des actions de soutien au vote. Chaque élection municipale est accompagnée d’un entraînement fonctionnel au vote, puis d’une rencontre avec les candidats, sur des critères définis par les usagers. Le résultat des travaux fait l’objet de documentaires accessibles.
La loi 2002-2 en 7 outils a consisté à accompagner les usagers dans la création d’un documentaire consacré à la loi de 2002. Ce documentaire présente les outils de la loi dans un dialogue avec les personnes concernées.
Le conseil de vie sociale est retransmis comme objet de débat. C’est un support de travail et d’implication des usagers dans la retransmission, sous forme d’émission accessible en direct dans leurs domiciles.
2) Le forum du devenir adulte : la volonté de transmettre aux plus jeunes
Beaucoup d’adultes étaient désireux d’agir et de maintenir le contact avec les services accueillant des enfants, adolescents et jeunes adultes. Cet atelier hebdomadaire a créé une dynamique avec le milieu associatif et les IME afin de mieux informer et accompagner les jeunes dans leur parcours.
Chaque année, il mobilise une cinquantaine d’associations et services pour une sorte de salon des parcours de vie. Il entraîne des rencontres et actions partagées dans l’Hérault, mettant à la portée de chacun la plupart des dispositifs, des associations (sport, vie affective, travail, logement, etc.).
Ce Forum a connu sa 6e édition en 2023 et constitue un lieu de rencontre, d’information et d’échange entièrement investi par les usagers et leur désir de transmettre.
3) L’université populaire des regards croisés : démocratiser les connaissances
Favoriser un accès à la connaissance, prendre la parole et encourager le désir d’apprendre : telle est l’ambition de l’UPRC.
Ce projet répond à l’absence ou à la faible participation des personnes dites déficientes intellectuelles à des colloques sur des sujets de société. Créer des moyens adaptés pour aborder un sujet de société : films, conférences visuelles, supports pédagogiques, associations dédiées au thème choisi.
Durant les débats, les adultes peuvent présenter leurs réflexions sous diverses formes : exposés visuels, diaporamas, documentaires vidéo, récits d’expérience.
Ce lieu annuel de rassemblement et d’échanges avec différents publics et étudiants a été créé en partenariat avec plusieurs centres de formation dont l’IRTS FAIRE ESS. Exemples de colloques thématiques qui réalisés : « Parlez-moi d’amour », « les idées reçues », « agir sur notre environnement », « les incroyables talents », « l’université du goût ».
4) Le club des rencontres : garantir la fréquence et la diversité des interactions
Cet atelier bihebdomadaire permet à des rencontres individuelles et collectives de se réaliser au travers de différents temps médiateurs : démarches artistiques, cabarets spectacles, universités populaires. Il favorise des accès individuels à d’autres milieux : groupe d’entraide mutuelle, visites auprès des personnes accueillies en EHPAD et crée fréquemment des évènements en fonction des choix des usagers : sorties en discothèques, accès à l’information culturelle, valorisation des talents, accès au patrimoine.
Ce groupe d’usagers est à l’origine de la création du « petit cabaret » un espace culturel et événementiel ouvert au public.
Le club des rencontres organise aussi des formations/sensibilisation destinées aux usagers sur différents thèmes : vivre ensemble, découvrir une ville, la sexualité et la vie affective.
5) L’atelier vidéo et le web journal « la petite rubrique » : deux ateliers pour faire valoir son regard sur le monde
Ils ont pour objectif d’animer une WEB TV en créant des reportages et des interviews. Ces ateliers sont aussi à l’origine de documentaires thématiques : « les guides des curieux » qui sensibilisent à des thématiques multiples : les réseaux sociaux, le monde virtuel, le patrimoine culturel, l’alimentation, la vie amoureuse.
Dans un premier temps, les membres du groupe préparent et choisissent leurs entrevues et les discutent en rédaction. Puis, les adultes réalisent les entretiens filmés. L’ensemble prend forme avec des documentaires qui impliquent chacun dans son rapport à l’actualité.
Pour diffuser leurs web TV, les usagers ont un site de présentation de leurs émissions et documentaires qui sont accessibles à tous.
6) L’atelier « écolibri » : multiplication des actions environnementales avec les autres
Cet atelier recueille des idées pour favoriser des actions écoresponsables en partenariat avec une école et d’autres établissements. Il est à la fois créatif, didactique et concret, axé sur une pédagogie de l’échange et de l’expérimentation avec les autres. Chacun est en possibilité de proposer des sorties régulières en nature.
Cet atelier intergénérationnel a été coconstruit avec le centre aéré de l’école Winston Churchill à Montpellier. La plupart de ces actions laissent une place importante aux enfants :
Lutte contre la pollution, actions de nettoyage de sites naturels, organisation de braderies solidaires, tels sont les axes du programme d’action de cet atelier régulièrement présenté au grand public sous forme de films, de fêtes ou d’actions solidaires.
7) Les ateliers art et culture : l’imagination à l’honneur
En partenariat avec la galerie « la jetée » les usagers sont invités tous les deux ans à une démarche artistique collective. La dernière en date fut la création d’une cité imaginaire : MICROTOPIA. Chacun a pu contribuer à une exposition présentant la cité qu’il rêverait de créer. La construction de maquettes, la mise en scène d’objets et les trouvailles artistiques en interaction avec des plasticiens sont présentées en deux expositions. Chacun est invité à prendre appui sur son imaginaire et ses compétences. Finalement la créativité et la scénographie sont partagées avec le grand public ce qui entraîne un fort effet de valorisation. La qualité de l’exposition et de la scénographie provoque régulièrement une double dynamique :
- le grand public se rend à une exposition pour en apprécier le style selon des critères artistiques communs. Il ne vient pas voir l’exposition des handicapés » ;
- le regard porté sur leur inventivité revient à les considérer dans des facettes multiples de leur identité sans les réduire à la liste de leurs manques ou de leurs écarts aux normes sociales.
L’évolution des politiques publiques des vingt dernières années a favorisé une révolution copernicienne dans l’accompagnement des adultes en situation de handicap.
Du côté des personnes accompagnées, un réel besoin de reconnaissance et de valorisation devient impératif pour qu’elles ne soient plus assimilées à des porteurs de troubles ou d’écart aux normes sociales.
Les éducateurs sont appelés à une modification de leur approche afin d’agir sur les identités subies et les approches stéréotypées. Ils sont appelés à concevoir des actions de prise de conscience de leur potentiel chez les usagers.
Pour les équipes pluridisciplinaires, c’est l’occasion de repenser les fonctionnements, de développer des liens durables avec la cité sous des formes multiples : artistiques, citoyennes, intergénérationnelles, sportives, pédagogiques, récréatives.
Soutenir les usagers dans leur pouvoir d’agir suppose de porter un regard différent mettant en valeur les initiatives, les innovations et les capacités de chacun, là où notre modèle médical nous pousse encore à regarder les troubles et les comportements atypiques.
Cependant, parler de pouvoir d’agir, c’est encore sous-entendre que la personne n’est pas capable d’avoir sa place dans un processus de participation. Protéger les personnes en difficultés de ceux qui paraissent mieux outillés pour participer peut justifier des normes de fonctionnement que seuls les professionnels connaissent. Le risque reviendrait à présenter le professionnel comme une sorte de modèle idéal aux usagers.
Le processus engagé, il nous paraît important de l’accompagner dans sa complexité. Il demande une réorganisation durable qui ne se décrète pas et demande aux institutions de sortir de leurs zones d’habitudes et de maîtrise pour définir un cadre global moins confortable qui nécessite d’être explicité, partagé et reconnu.
Investir d’autres lieux permet aux personnes de trouver d’autres modèles d’identification et de construction identitaire.
Interagir de façon régulière dans différents milieux et contribuer de façon fréquente modifient le système des places en favorisant la possibilité de relations plus horizontales entre participants. Les observations des professionnels et des personnes accompagnées témoignent des effets d’autorégulation que favorisent l’inscription et l’action dans différents tissus sociaux. En s’impliquant, les usagers libèrent leurs capacités à prendre des initiatives et sécrètent des formes d’habiletés sociales.
Il ne s’agit pas de nier les troubles du comportement, mais plutôt de les observer en lien avec des parcours marqués par des sentiments de dévalorisation et un regard stigmatisant.
Nous observons aussi qu’en prenant part à des projets collectifs par le biais d’ateliers/projets réguliers, les personnes accompagnées sont invitées à sortir de logiques individualisantes et d’en limiter le sentiment d’incapacité à agir. Participer à des groupes d’action offre une voie sociale de réussite, une voie complémentaire à celle de la psychologisation institutionnelle de la personne et de ses troubles. Le groupe devient un contenant et un support qui contribue au développement de liens sociaux au croisement de la personne, la cité et l’institution.
Nous évaluons fréquemment que ce que nous aurions vu auparavant comme des « troubles personnels » est mis à distance au profit d’enjeux collectifs. La participation et la motivation des personnes contribuent à un fonctionnement de meilleure qualité par les dynamiques inclusives qu’elles produisent.
C’est dans l’expérience de l’agir collectif que chacun peut se vivre comme en progrès et développer un esprit de coopération, quel qu’il soit. Chacun apprend à se reconnaître comme semblable et différent en contribuant à des aspects du bien commun à partir de ses appétences et attentes. Ce pari de la découverte de l’autre et de soi par l’engagement et la mobilisation contribue à une socialité positive, une contribution de chacun à un monde commun.
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